Le 80e anniversaire de l’Opération BITING

 

 

Comprendre, célébrer, commémorer

L’opération Biting s’est déroulée dans la nuit du 27 au 28 février 1942. Au cours de ce raid éclair, une compagnie de 120 parachutistes britanniques commandée par le major Frost est larguée sur nos hautes falaises. Sur la commune de La Poterie-Cap-d’Antifer se trouve un radar allemand d’un modèle encore inconnu des services anglais, présentant une grave menace pour les appareils de la Royal Air Force qui bombardent l’Europe occupée. La mission des parachutistes est de neutraliser la garnison, de faire des prisonniers et, surtout, de se saisir des éléments clés du radar pour que sa technologie puise être évaluée par les scientifiques. Puis, une fois les défenses de la plage de Bruneval neutralisées, les parachutistes rembarqueront à bord de péniches qui seront remorquées par des vedettes rapides jusqu’en Angleterre. La mission est un succès et permettra aux Britanniques de brouiller efficacement les radars allemands.

Bruneval, lieu de mémoire

Riche de cette histoire, Bruneval devient un lieu de mémoire de la Seconde Guerre mondiale. C’est d’abord le général de Gaulle qui, en 1947, ancrera Bruneval dans la mémoire collective. En effet, en mars de cette année-là, il prononcera un discours, devenu historique, présentant sa version d’une France unanimement combattante et résistante. À cette occasion, il scellera une dalle de granit sur le toit d’un ancien bunker allemand. Le premier monument de Bruneval est né, célébrant la première opération alliée réussie sur le sol français grâce à la Résistance. Anciens résistants ou anciens déportés, ils seront près de 20 000 sur la falaise, venus écouter la parole du général. Mais la mémoire s’étiole pendant 25 ans jusqu’à ce qu’André Haraux, ancien déporté à Mauthausen, la ravive en 1975. Il fait ériger un monument en forme d’ailes, symbolisant le raid britannique et, plus largement, l’opération militaire, la résistance et les 90 000 Français déportés dans les camps allemands. En 1977, un escalier relie le monument à la plage. Construit par de jeunes Français et Allemands, il est dédié à Charles de Gaulle et complète le site. Une pierre de la carrière du camp de Mauthausen est scellée dans l’une des marches et une plaque de bronze reprend des éléments du discours de 1947. Les cérémonies anniversaires s’enchaînent sur ce lieu réinvesti par les vétérans et culminent avec le 40e anniversaire du raid en présence de François Mitterrand et du Prince Charles d’Angleterre. Les derniers vétérans disparaissent dans les années 2000 et ce sont désormais les descendants de la Bruneval Company qui sacrifient au devoir de mémoire, sous la figure tutélaire et bienveillante de Kenneth Holden. Ancien de la Royal Navy, K. Holden participe à l’opération Biting en tant que mitrailleur sur l’un des Motor Gun Boats chargés de ramener les parachutistes en Angleterre. Décédé en 2019, il sera le dernier vétéran connu du raid.

Le mémorial de Bruneval, trait d’union entre histoire et mémoire

C’est à l’occasion du 70e anniversaire du raid, en 2012, que le monument de Bruneval se transforme en mémorial de Bruneval. La commune de Saint-Jouin Bruneval en partenariat avec l’Association Bruneval 42 Histoire & Mémoire se lance dans un grand projet de rénovation du site, en bénéficiant de l’expertise du cabinet d’architecte Bruno Saas. De nouveaux éléments d’architecture viennent valoriser le site et son environnement, et un ensemble de 24 panneaux pédagogiques racontent en détail à travers textes, photos et cartes l’histoire du raid et du mémorial à la façon d’un grand livre ouvert.

Le dimanche 27 février 2022, date anniversaire de l’opération Biting, les personnalités officielles déposeront une gerbe au mémorial de Bruneval à 10 h.

Les grandes festivités du 80e anniversaire se dérouleront les 25 et 26 juin 2022. Parmi les manifestations prévues, une exposition organisée par l’Association Bruneval 42 en partenariat avec Pays d’Art et d’Histoire évoquera l’opération Biting et les débuts de la construction du mur de l’Atlantique. Cette exposition se déroulera à la Maison du Patrimoine au Havre du 26 février au 29 mai. Autre événement remarquable, le déplacement des élèves de CM2 de l’école primaire Le Pélican, qui se rendront le 23 juin à l’Arc de Triomphe pour y prendre la flamme, après s’être arrêtés au Mont-Valérien. Par ailleurs, le mémorial de Bruneval s’enrichira de la réplique d’une péniche de débarquement britannique LCA à l’échelle 1.

Embarquez au mémorial

À l’occasion du 80e anniversaire de l’opération Biting, le mémorial de Bruneval s’enrichira d’une réplique à l’échelle 1 d’une péniche de débarquement britannique du modèle utilisé lors du raid de février 1942. Ce petit bâtiment de type ALC (Assault Landing Craft) évoquera la dimension navale de l’opération. Mais l’ambition de ce projet est également de proposer aux visiteurs du mémorial une expérience immersive, puisque l’intérieur de la péniche sera accessible au public. Celui-ci pourra se rendre compte de ce que pouvaient éprouver les 35 soldats entassés dans cet espace réduit, ballottés par la mer froide de février et faiblement protégés des armes légères par une tôle de blindage sur les côtés. Le mémorial de Bruneval rejoint ainsi la muséographie des musées du Calvados et de la Manche, dédiés au débarquement du 6 juin 1944 et à la bataille de Normandie, qui exposent ce type de matériel.

CPM Industrie, entreprise de Saint-Romain, en partenariat avec le lycée Lavoisier et l’école de production de la Métropole Havraise, a en charge la construction de la péniche. Des plans d’époque vont permettre de reproduire le plus fidèlement possible cette embarcation de douze mètres trente de long sur trois mètres dix de large, illustrant ainsi le savoir-faire local et l’implication de la jeunesse dans la valorisation du patrimoine mémoriel.

 

Dans un premier temps, la péniche sera présentée sur le mémorial. Lorsque les conditions seront réunies, elle sera installée sur le perrey de la plage de Bruneval.

Rappelons que cette flottille d’ALC est transportée par le Prins Albert, un ancien ferry belge, et mise à l’eau au large de Bruneval d’où elle s’approcha silencieusement dans la nuit. Lors de l’évacuation de la plage sous les tirs allemands, les hommes du raid rembarquent dans des conditions chaotiques. Une péniche s’échoue, une autre tombe en panne et, sur certaines, les parachutistes durent parfois écoper avec leurs casques pour regagner le large. Des péniches sont surchargées, tandis que d’autres partent quasiment vides. Elles parviennent cependant à rejoindre les vedettes rapides qui les remorqueront jusqu’à Portsmouth, mais en abandonnant six parachutistes sur la plage de Bruneval, arrivés trop tard pour embarquer.

Cet épisode de l’opération Biting sera désormais symbolisé par la réplique d’une des barges utilisées durant le raid. Elle contribuera également à valoriser le site de Bruneval en proposant un outil de médiation original entre l’histoire et un public toujours séduit par les expériences immersives.